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Chut! : Parler des pratiques numériques des ados au lieu d'angoisser

Un média papier sur numérique et jeunes en 2023 ? Cela peut paraître étonnant, c’est pourtant le parti-pris de Chut! Explore, nouveau magazine dédié aux ados. On en discute avec Sophie Comte, co-fondatrice de ce média.

Portrait de Sophie Comte
Sophie Comte, co-fondatrice de Chut! Magazine

Tout part d’une intuition personnelle : les équipes de Chut! Magazine, trimestriel dédié au numérique lancé en 2020, ont des enfants qui grandissent et sentent qu’il se passe quelque chose sur le numérique avec les jeunes. 63% des moins de 13 ans sont sur un réseau social, et les enfants qui arrivent en 6ème ressentent une forte pression sociale à avoir un téléphone portable. Dans ce contexte bien connu, de nombreux parents sont inquiets : de la montée en puissance d’Internet et des réseaux sociaux, de la difficulté à s’adresser à leurs enfants sur ces sujets, des risques divers et variés des écrans.

Sortir de l’opposition entre monde réel et virtuel 

L’écran, qui étymologiquement signifie “barrière”, concentre les angoisses : l’écran symbolise la séparation entre le monde réel et le monde virtuel, comme si les jeunes partaient vers un autre monde et que la frontière était hermétique. Or, il y a une vraie continuité entre ces deux mondes. Cette vision manichéenne du monde réel et du monde virtuel que l’on oppose nous amène à sous-estimer ce qui se passe en ligne”, souligne Sophie Comte.  

En effet, il n’y a pas que la notion de risque dans le numérique : les jeunes, tout comme les adultes finalement, peuvent découvrir de nombreux  contenus passionnants sur les réseaux sociaux, et les pratiques numériques diffèrent fortement d’un jeune à un autre. “Il faut sortir du cliché de l’ado écervelé, qui scrolle sur TikTok en regardant des vidéos abrutissantes.” Sophie Comte évoque la notion d’encapacitation : l’objectif de Chut! Explore est d’amener de la connaissance et de l’information pour aider les jeunes à devenir “capables” avec le numérique, à renouveler leur manière de penser et d’agir au quotidien. Comment ? En recréant du lien, en questionnant les pratiques, en renouant le dialogue. Et pour cela, le format papier est idéal : c’est un support que l’on peut partager, regarder entre copains, avec sa famille. C’est aussi se donner la possibilité d’une autre temporalité, prendre le temps, en réponse à l’injonction au flux constant et à l’immédiateté. 

On a failli l’appeler le magazine de la culture numérique pour les familles, explique Sophie Comte. Car tout le monde a besoin de culture numérique. Il devrait y avoir des cours d’éducation civique et numérique dans tous les collèges : aujourd’hui, il y a des cours de code en 5ème, mais pas de socle de connaissances partagées autour du numérique et des technologies, et surtout de la façon dont cela transforme notre société. Il faut sortir du prisme uniquement geek ou technique, et aller vers une vraie montée en compétences. Le numérique touche toutes les activités humaines aujourd’hui.”

Culture numérique : sortir des marges 

En ce sens, Chut! Explore se veut aussi une réponse aux besoins scolaires  : “Chut! Magazine est déjà distribué dans les lycées des CDI. Les professeurs documentalistes dans les collèges nous l'ont demandé, mais ce format est trop pointu pour ce public. En revanche, ils nous ont fait savoir qu'ils avaient besoin de supports pédagogiques sur le numérique à destination des collégiens, c’était presque une demande d’avoir un support pédagogique sur ces sujets.” L’objectif est vraiment que toutes les matières s’emparent du sujet du numérique. Ainsi, dans chaque numéro de Chut! Explore, un texte de fiction sera publié dans le cadre d’un concours de nouvelles : amener le numérique en cours de français c’est possible !

Ce qui montrerait la réussite du magazine ? “Que demain la culture numérique soit présente dans toutes les matières !

Chut! Explore, concrètement, ce sera quoi ? 

Un magazine très court et graphique, qui donne envie de découvrir les sujets. 

  • Rubrique “Décode” : un article de fond, à la une du magazine.

  • Rubrique “en mode selfie” : on y parlera par exemple de Body positive dans le premier numéro

  • Un volet ludique avec des quiz, des anecdotes… 

  • Une BD

  • Un texte de fiction, gagnant du concours de nouvelles

  • Une illustration sous la forme d’un poster 

  • Des fiches métiers, avec une attention particulière au choix des rôles modèles : des jeunes adultes dans le monde du travail, des profils sur lesquels les jeunes pourront se projeter.